Odes aux multitudes et aux hétérodoxies


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Le réel est complexe. Cette affirmation n’a rien d’extraordinaire, n’est-ce pas ?

Et pourtant, notre tentation est de la simplifier pour permettre de la comprendre… mais surtout, de la maîtriser.

Dans un autre article, je parlais de « performance » à maîtriser coûte que coûte… Une vieille publicité d’un constructeur italien de pneu avait comme slogan « Sans maîtrise, la puissance n’est rien. » (bon… ça date, je sais :))

Le problème de la « maîtrise », c’est qu’elle agit comme une forme d’emprise sur le réel. Il ne faudrait voir le réel que par un seul prisme, celui de la croyance en la « maîtrise ». Tellement plus simple de penser que la Terre est plate qu’une fois arrivé au bord, nous tombons dans un précipice sans fin…

 

Appliqué au management et nous savons combien celui-ci comme d’autres domaines sont sensibles aux effets de mode, il y aurait une « recette » miracle qui pourrait permettre de nous sortir de la crise… Le « lean management » a été il y a quelques années, une de ces recettes miracles… Je ne rentrerai pas ici dans le faux débat de savoir si c’est bien ou mal, il y a assez de littératures à ce propos sur le net.

Mon propos est de lutter contre la simplification de la pensée autour de l’effet de mode, de la tendance mouton-qui-suit-son-troupeau et de la cohorte des consultants-berger de tous bords… Tout le monde un peu censé comprendra assez facilement qu’un mode de management pensé, testé et conçu au Japon par des japonais pour des japonais ne peut être appliqué à la lettre en France à des français par des français… Je n’ose même pas imaginer en France à des français par des japonais… 🙂

Au lieu de retenir l’essence d’un concept et de proposer son adaptation, d’en percevoir les limites et les faiblesses, il est plus efficace de l’appliquer directement… sans penser à son effet. Terriblement plus facile d’être dans le prosélytisme que dans la pensée critique…

 

En dehors du champ du management, dans les milieux universitaires, c’est la même chose… voire peut-être même pire…

Un Maître dit que le travail doit être cliniquement analysé d’une certaine manière…

Les apôtres s’inclinent, et pour être encore plus royaliste que le Roi, appliquent avec encore plus de ferveurs les manières du Maître en devant des impensées maniérées.

 

Ma conception de la pratique, celle du terrain de tous les jours, de celui qui a la main dans le cambouis, est celle du bon sens mais aussi de la multitude et de l’hétérodoxie.

L’orthodoxie, la pensée Unique, traîne toujours derrière elle les mêmes ombres sombres des terreurs, enferme dans des carcans étroits où la liberté de penser est limitée par les seuls Re-pères admis.

Or, nous le savons tous.

Le monde est multiple (la « mondialisation » ou la « globalisation » en vante les mérites), sa multitude est la source même de l’espoir…

Tant que l’autre n’effraie pas, tant que l’autre est admis comme être vivant doté d’intelligence et nous, capables d’accepter ces différences et d’entrer en controverses…

Et aujourd’hui, nous le savons… l’altérité n’est pas donnée à tout le monde…

 


A propos Moto Takashima

Moto Takashima est psychologue du travail, gérant de Métissages et responsable éditorial d'iVa. Dans d'autres langues, ça s'appelle Community Manager. :p