Digital labor


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Le Digital Labor, c’est toute activité sur Internet ou médiatisée par des technologies de l’information et de la communication, non spécialisée, et qui produit de la valeur, principalement en produisant des données.
Ce n’est pas le travail d’un professionnel, mais celui de n’importe quel utilisateur qui travaille sans le savoir au moment où il clique sur un lien, regarde une vidéo ou au moment où il échange sur un réseau social. Ce sont des activités banales, mais qui dans leur ensemble nourrissent d’énormes bases de données qui sont monétisées. C’est de la production de valeur qui ne dit pas son nom.

L’exemple que j’aime donner est celui de (Amazon) Mechanical Turk. On y trouve du travail que les machines font très mal : identifier des gens ou des objets sur des photos, organiser des listes de morceaux de musique (Playlist) par genre, ou résumer en un mot l’émotion qui se dégage d’un message. Les ouvriers d’Amazon, les turkers, sont payés quelques centimes pour le faire, mais c’est aussi exactement ce qu’on fait lorsqu’on arrange une playlist sur Deezer ou Spotify, ou qu’on « tag » un proche sur une photo Facebook. Des turkers sont aussi rémunérés pour cliquer sur des liens, « liker » sur Facebook, ce qu’on peut faire par notre usage normal d’Internet. La seule différence est l’objectivation du travail. La frontière entre l’activité travaillée et le loisir se brouille, c’est pourquoi des sociologues emploient de nouvelles notions comme Playbor, contraction de Play, le jeu, et Labor, travail.

Antonio Cassili, Maître de conférences en humanités numériques, Telecom-Paris-Tech et EHESS.

Les psychologues du travail doivent continuer à penser ces changements de paradigmes sur la question du travail.

Qu’est-ce que le travail lorsque celui-ci devient virtuel et mondialisé, fragmenté et diffracté ?

Le travail se réalise avec d’autres, ceux qui prescrivent celui-ci, ceux qui en bénéficient, ceux qui perçoivent une rémunération… Le travail est au coeur de l’existence humaine. Si celui-ci se fragmente, comment notre identité peut-elle être rassemblée ?

Le réel a toujours un train d’avance sur la recherche, la pratique de la psychologie du travail doit être mis au goût du jour…

Il semble nécessaire de repenser la question même de la construction identitaire à travers l’implémentation de la « force » numérique au coeur même de l’activité et la virtualité comme ressort à la créativité.


A propos Moto Takashima

Moto Takashima est psychologue du travail, gérant de Métissages et responsable éditorial d'iVa. Dans d'autres langues, ça s'appelle Community Manager. :p